dimanche 4 mars 2012

FATCA: enfin la fin des banques offshore ?

Quand, au G20 de Londres en 2009, les dirigeants de la planète ont proclamé la fin du secret bancaire, il fut possible de croire, un bref instant, à une vraie prise de conscience née du cataclysme financier de l'automne 2008. Enfin, se prenait-on à rêver, les milliards d'euros engloutis dans les trous noirs de la finance mondiale serviraient-ils à financer le développement des pays du sud ou le maintien de services publics de qualité au nord. Mais il fallut rapidement déchanter, tant il fut facile pour les paradis fiscaux de quitter l'infamante liste noire de l'OCDE tout en poursuivant le business as usual. Avec le recul, la fin annoncée de l'ère du secret sonne comme un échec retentissant.
Et pourtant, une législation adoptée en 2010, plutôt discrètement, par le Congrès américain, bouleverse aujourd'hui la finance internationale, au point que certains se demandent si Washington n'a pas trouvé la formule pour tuer les banques offshore.
La loi FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) oblige toutes les institutions financières du monde à conclure avec l'Internal Revenue Service (IRS, le fisc américain) un accord prévoyant une procédure détaillée de divulgation des avoirs des contribuables américains. La grande nouveauté, c'est que les Etats-Unis ne se contentent plus de demander ces informations. Ils les exigent, avec mesures de rétorsion à la clé. Les banques et autres fonds financiers qui ne signent pas d'accord valable avec l'IRS se verront frappés d'un prélèvement de 30% sur tous leurs revenus provenant des Etats-Unis ou des autres banques participantes. Un taux prohibitif qui agite le secteur de la banque privée et de la gestion de richesse, notamment en Europe, où certaines institutions se sont fait une spécialité d'accueillir les contribuables américains en quête de discrétion. Participer ou non au programme ? Les banques hésitent. Les firmes de conseil (KPMG, Ernst&Young, Deloitte...) se frottent les mains et multiplient les séminaires pour aider leurs clients financiers à se préparer à l'entrée en vigueur (en 2013) d'une législation d'une portée nouvelle et d'une grande complexité. Autre signe de son importance: le nombre d'articles sur les sites attachés à la "liberté"des contribuables, qui dénoncent une atteinte selon eux inacceptable de l'Etat à la vie privée des Américains. Cette vidéo, postée sur Youtube, résume les arguments anti-FATCA (plus ou moins raisonnables ou carrément farfelus, comme "FATCA permettra aux terroristes d'obtenir, via des banques corrompues, l'adresse des Américains à l'étranger").


Cette agitation indique que les Etats-Unis pourraient bien avoir trouvé le remède à l'évasion fiscale de leurs contribuables. Ceux-ci n'auront sur la planète plus d'endroit où se cacher, plus de juridiction où s'abriter derrière une souveraineté factice.
Cinq grands pays européens (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Espagne) ont déjà conclu avec l'IRS un accord prévoyant la réciprocité. Ils collecteront eux-mêmes les informations auprès de leurs banques et les remettront à l'IRS - et  vice versa. Une réciprocité que le gouvernement américain est prêt à généraliser, comme l'a indiqué récemment la secrétaire d'Etat adjointe aux questions fiscales Emily McMahon.

The Treasury's longer-term goal, she said, is a more comprehensive multilateral approach to information exchange. The bilateral agreements that it is now proposing to make FATCA work would be precursors to that goal.

"For that reason, we believe that FATCA, if implemented appropriately, can serve as a catalyst for further advances in the global effort to improve transparency and combat tax evasion", said McMahon. (ici)
Qu'attend le reste du monde pour emboîter le pas ? Les gouvernements qui s'abstiendront, ceux qui préféreront aligner les accords bilatéraux inefficaces ou les opérations d'amnistie, seront coupables de ne pas s'attaquer sérieusement à l'évasion fiscale.

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